Recrue d’un Jour

Le journaliste de Les Affaires suit le finaliste de CEO x 1 Jour Robert Frank et Marc Bertrand, PDG de Mega Brands, à New York.

Mega Brands

Par: Matthieu Charest

Près de 1 000 candidats avaient répondu à l’appel de la firme de recrutement Odgers Berndtson. Au final, seulement 12 ont été retenus. Des étudiants triés sur le volet pour marcher dans les pas de pdg de grandes entreprises, le temps de l’événement CEO d’un jour.

Nous avons suivi l’un d’entre eux, Robert Frank, 22 ans, lui-même observant le pdg de Mega Brands, Marc Bertrand.

Et puisque M. Bertrand, comme une bonne partie de son équipe, se trouvait à New York à la mi-février pour participer à la Toy Fair, c’est là que nous les avons accompagnés.

Vers 8 h, Les Affaires a rencontré M. Frank et Lynda Newcomb, vice-présidente, personnes et culture, chez Mega Brands, à l’aéroport Montréal-Trudeau. Tout sourires, ils ont à peine le temps de nous mentionner leurs expectatives avant le décollage. «Je ne sais vraiment pas à quoi m’attendre, lance Robert Frank, j’ai vu des photos de la Foire et ça me semble tellement immense !» «Ça va être fantastique, dit Mme Newcomb, gaiement. C’est la première fois que je participe à la Foire.»

Un tourbillon et des centaines d’exposants.

La journée va se dérouler à une vitesse folle. Vers 10 h 15, après un vol de 45 minutes, alors qu’il devait durer près d’une heure et demie, notre trio s’engouffre dans le taxi qui nous mènera au centre des congrès Jacob K. Javits, où se tient la Foire, à l’autre bout de la ville. Nous avons de l’avance sur l’horaire, et une fois que nous avons trouvé le kiosque de Mega Brands – plus facile à dire qu’à faire, car l’événement reçoit 1 100 exposants -, nous sommes accueillis par toute l’équipe et M. Bertrand lui-même.
Le pdg nous montre fièrement les collections de jouets que son entreprise mettra en marché cette année. D’ailleurs, le kiosque a plus des airs de petite boutique que de comptoir. C’est là que les acheteurs des Toys R Us et Wal-Mart de ce monde viennent se mettre au parfum des produits et passent leurs commandes.

Vers midi, Robert Frank assiste à une présentation qui porte sur une étude de marché sur l’industrie du jouet. Il en ressort stupéfait. «J’étais de loin le plus jeune dans la salle, et je suis de loin le plus étonné par ce que j’ai appris. Imaginez, on parlait de poupées branchées sur Internet !»

Vers 13 h 50, tout le monde se retrouve pour un dîner informel. Très terre-à-terre, très accessible, Marc Bertrand répond aux nombreuses questions de Robert Frank. Le lunch à peine terminé, MM. Bertrand et Frank se rendent compte qu’ils ont tous les deux grandi à Dollard-des-Ormeaux, et qu’ils ont fréquenté la même école secondaire.

À 14 h 45, nous marchons dans l’immense salle. Les jouets se comptent par milliers. Quelques mètres en avant, le pdg et l’étudiant sont encore en grande conversation. «Ça, tu en penses quoi, lui demande Marc Bertrand. Et ça ? Et ça, c’est une bonne idée ? Qu’est-ce que toi, tu ferais ?»

Pas de doute, les deux hommes ont des affinités.

La journée se termine vers 16 h 30. Tour à tour, ils confient à Les Affaires qu’ils sont ravis du déroulement de cette aventure. «Nous aimons beaucoup ce genre d’activité là [de mentorat], souligne Marc Bertrand. C’est bon pour les jeunes, ça leur montre quelle est la réalité du monde des affaires. C’est bon pour nous aussi, parce que ça nous donne souvent de bonnes idées. Chez nous, la politique qui veut que la meilleure idée gagne prévaut.»

Quant à savoir s’il serait prêt à engager le jeune homme : «Après ses études, c’est sûr qu’on lui parlerait !»

Et l’intéressé de répondre : «C’est une entreprise extraordinaire. Je la prendrais très sérieusement en considération.»
Robert Frank, l’un des quatre candidats québécois choisis pour participer à cette journée (il y en avait également huit en Ontario), a dû surmonter une série d’obstacles avant de parvenir à ses fins.

À partir du Danemark, où il a étudié un trimestre, il a d’abord rempli le formulaire d’inscription en ligne. Puis, il a passé un examen psychométrique. Ensuite, il devait se soumettre à une entrevue téléphonique. Une fois ces étapes franchies, et une fois de retour au pays, Robert Frank devait affronter les dix candidats restants dans l’arène, c’est-à-dire les bureaux montréalais d’Odgers Berndtson. Au menu, étude de cas et autres entrevues, en personne cette fois. Ce n’est qu’après cette journée décisive que le verdict est tombé, le gladiateur Frank devait poursuivre l’aventure.

«Les étudiants vivent exactement le même processus de recrutement [qu'un haut dirigeant], explique Roger Duguay, directeur associé pour la firme. C’est très difficile de décrocher des emplois dans les très hautes sphères, et ces étudiants ont la chance de vivre une expérience de très haut niveau.»

«C’est un milieu tellement concurrentiel qu’on doit se démarquer autrement, explique Robert Frank. Je pense que le but était de trouver le bon match pour chaque pdg, ajoute l’étudiant en commerce et en finances de l’Université d’Ottawa.»

«Ce n’est pas tout d’avoir de bonnes notes à l’école, confirme M. Duguay, d’Odgers Berndtson. Maintenant, on recherche un candidat complet, notamment quelqu’un qui a de bonnes aptitudes en relations interpersonnelles.»

En l’occurrence, M. Frank travaille à temps partiel dans une institution financière, il a participé à un projet humanitaire au Costa Rica et il revient d’un trimestre au Danemark, «parce que tout le monde choisit d’aller en France ou au Royaume-Uni».

Le concept qui sous-tend CEO d’un jour est déjà exploité depuis sept ans par Odgers Berndtson en Europe, entre autres en Allemagne, au Portugal et en Espagne. Au fil des ans, ces journées ont acquis une telle notoriété que la firme doit maintenant refuser des entreprises qui veulent répéter l’expérience d’une année à l’autre.

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